1635 - 1644
SITUATION DE
LA FRANCHE-COMTÉ AU XVIe SIECLE
Au XVIe
siècle, pendant le règne de Charles-Quint, la Franche-Comté
était tranquille et prospère. Son statut un peu spécial la
mettait à l'abri des démêlés entre, d'une part, la France,
et, d'autre part, l'Espagne et l'Autriche, Ã cause des
traités de neutralité garantis par les cantons suisses.
Après l'abdication de Charles-Quint, Philippe II devient roi
d'Espagne et comte de Bourgogne. Il doit lutter contre le
protestantisme qui envahit la Franche-Comté grâce à la
proximité de la Suisse et du comté de Montbéliard. Le
parlement de Dole, fortement appuyé par Philippe II, aide au
succès de la cause catholique et évite ainsi à la
Franche-Comté de connaître les troubles des guerres de
religion, comme ce fut le cas en Allemagne pendant plus de
trente ans.
Malheureusement un autre danger menace la
Franche-Comté. Le 17 janvier 1595, le roi de France Henri IV
déclare la guerre à l'Espagne. Après la victoire des
Français sur les Espagnols à Fontaine-Française dans le
duché de Bourgogne, Henri IV envahit en personne, au mois de
juin 1595, la province espagnole de Franche-Comté sans se
soucier de sa neutralité. De Baume-les-Dames Ã
Lons-le-Saunier, plusieurs villes sont maltraitées et
contraintes de payer des sommes considérables sous peine
d'être dévastées. Craignant que les Suisses, chargés de
faire respecter la neutralité, interviennent, Henri IV
quitte précipitamment Lons-le-Saunier non sans avoir brûlé
ses deux faubourgs.
La paix de Vervins signée en 1598
rend à la France et à l'Espagne leurs conquêtes mutuelles.
Cette même année meurt Philippe II qui laisse les Pays-Bas
et la Franche-Comté à sa fille aînée, l'infante Isabelle
Claire Eugénie mariée avec l'archiduc Albert d'Autriche.
LA GUERRE DE DIX ANS (1635-1644)
En 1611,
Isabelle Claire fait renouveler le pacte de neutralité qui
avait été convenu en 1522 entre la France et la
Franche-Comté par Marguerite d'Autriche. D'après le pacte,
la neutralité devait être observée jusqu'en 1640. Ce fut
loin d'être le cas.
Sous le gouvernement de
l'Archiduc Albert d'Autriche et d'Isabelle Claire, la
Franche-Comté vit dans la paix. En 1621 meurt l'archiduc
Albert tandis que son neveu Philippe IV accède au trône
d'Espagne. Quatorze ans plus tard, Isabelle Claire meurt Ã
son tour sans postérité et laisse la Franche-Comté Ã
Philippe IV.
Entre-temps, en janvier 1629, Richelieu
avait écrit à Louis XIII : « On pourrait penser à la Navarre
et à la Franche-Comté comme nous appartenans, estans
contiguës à la France et faciles à conquérir toutes fois et
quantes que nous n'aurons autre chose à faire ». Dans le
dessein d'arrêter l'agrandissement de la maison d'Autriche,
Louis XIII, conseillé par Richelieu, s'était allié à la
Ligue Protestante qui comprenait les princes d'Allemagne et
le roi de Suède Gustave Adolphe. Face à eux, la Ligue
Catholique était composée de l'empereur germanique Ferdinand
II, du roi de Hongrie, du roi d'Espagne Philippe IV et du
duc Charles IV de Lorraine. Or Gaston d'Orléans, frère de
Louis XIII et en rébellion contre lui, avait des liaisons
avec Charles IV de Lorraine et Philippe IV.
Prétextant que Besançon avait accueilli Gaston d'Orléans,
Louis XIII rompt le traité de neutralité malgré l'opposition
du Parlement de Dole et, le 27 mai 1635, il déclare la
guerre. Richelieu concentre à Auxonne une armée de plus de
25 000 hommes dont il confie le commandement au Prince de
Condé. Le 29 mai 1636, le Prince de Condé se présente devant
Dole, capitale de la Province. Condé pensait qu'après la
chute de Dole, siège du gouvernement, la conquête de la
Franche-Comté serait plus facile. Mais après un siège de
trois mois et devant l'arrivée de 13 000 Impériaux (ou
soldats de l'empereur d'Autriche), Condé est obligé de lever
le siège pour aller défendre Corbie en Picardie.
En
1637 la guerre est toujours présente en Franche-Comté. Trois
armées envahissent simultanément cette province : le duc
Bernard de Saxe-Weimar par la Saône, le marquis de Grancey
par Montbéliard et le duc de Longueville par la Bresse. Le
29 mars 1637 le duc de Longueville assiège Saint-Amour,
petite ville située dans le bailliage d'Aval (1). Après un
siège d'une semaine où les assiégés font preuve d'un grand
courage, Saint-Amour tombe aux mains des Français. Plusieurs
villages sont également pris par le duc de Longueville. La
tactique des Français est simple : elle consiste à prendre
les petites localités pour ne pas avoir à attaquer les
grands centres de résistance. Le duc de Saxe-Weimar, au
service des Français, en fait tout autant : il pille,
rançonne et dévaste tout sur son passage. Ainsi dans le
Bailliage d'Amont, il s'empare, entre autres, de Jonvelle et
de Jussey, il fait brûler Pierrecourt et tuer tous ses
habitants. Il se rend maître de nombreuses forteresses près
de la Saône. Charles IV, le duc de Lorraine, qui se voit
confier le gouvernement de la Franche-Comté par le roi
d'Espagne Philippe IV, reste à Besançon tandis que ses
soldats ont la charge de défendre le Bailliage d'Amont. Mais
les soldats, indisciplinés, se comportent comme leurs
ennemis, les Français, c'est-à -dire en vrais pillards. Le
bailliage d'Amont est ainsi dévasté, saccagé et affaibli
aussi bien par ses ennemis, les Français, que par ses
alliés, les Lorrains.
En 1638, alors que la peste
poursuit ses ravages commencés en 1636 lors du siège de Dole
et que la guerre continue, un autre fléau fait son
apparition en Franche-Comté : la famine. Voici ce qu'en dit
Girardot de Nozeroy dans son « Histoire de Dix ans de la
Franche Comté de Bourgogne » :
« Les livres sacrez
racontent avec larmes les tristes afflictions du peuple Juif
: Joseph narre la famine qui fut à Jérusalem durant son
siège où les meres mangerent leurs propres enfans : le siege
de Paris soub Henri IV a quelque chose d'approchant, mais
(sans rien encherir) la famine de nostre Bourgougne en cette
année 1638 a passé par dessus tout cela incomparablement. La
postérité ne le croira pas, les riches qui possedoient force
chevances et avoient eu au commencement des espargnes,
estoient espuisez, les pauvres paysans estoient retirez dans
les villes sans labeur ny employ, le bled (blé) rare partout
se vendoit à prix desmesuré : on vivoit des herbes des
jardins et de celles des champs : les charognes des bestes
mortes estoient recherchées aux voiries, mais cette table ne
demeura pas long temps mise : on tenoit les portes des
villes fermées pour ne se veoir accablez du nombre des gens
affamez qui s'y venoient rendre, et hors des portes les
chemins demie lieüe loing estoient pavez de gens haves et
deffaictz, la plus part estenduz de foiblesse et se mourant
: dans les villes les chiens et les chats estoient morceaux
délicats, puis les rats estans en regne furent de requise,
j'ay veu moy-mesme des gens bien couverts relever par les
rües des rats morts jettez par les fenestres des maisons et
les cacher pour les manger. En fin on vint à la chair
humaine, premièrement dans l'armée où les soldats estans
occis servoient de pasture aux autres qui couppoient les
parties plus charnues des corps morts pour bouillir ou
rostir, et hors du camp faisoient picorée de chair humaine
pour manger : on descouvrit dans les villages des meurtres
d'enfans faicts par leurs meres pour se garder de mourir et
des freres par leurs freres, et la face des villes estoit
partout la face de la mort ».
Fuyant la faim, de
nombreux Comtois, dont des habitants de Frasne,émigrèrent en
Savoie, en Suisse et même en Italie, à Milan et à Rome.
Après avoir pris le duché de Bourgogne, l'Alsace et le
Comté de Montbéliard, la France voulait pour frontière les
montagnes du Jura. Aussi Richelieu donne-t-il l'ordre Ã
Bernard de Saxe-Weimar "d'envahir, de conquérir au nom de la
France" toute la Franche-Comté limitrophe de la Suisse,
c'est-à -dire la région montagneuse beaucoup moins éprouvée
par la famine que le plat pays. Mais qui est-il donc, ce
Bernard de Saxe-Weimar ? Après la mort du roi de Suède
Gustave II Adolphe en 1632, Bernard, duc de Saxe-Weimar,
avait pris le commandement de l'armée suédoise. Par un
traité conclu en 1635 avec la France, il devait entretenir
18 000 hommes au service de cette nation. Plus connus sous
le nom de Suédois, ces soldats, qui avaient été pour la
plupart recrutés en Allemagne, lui étaient très fidèles.
Après avoir passé presque toute l'année 1638 en Alsace,
Bernard de Saxe-Weimar s'empare de Brisach le 19 décembre
1638 avec l'aide des troupes françaises du général de
Guébriant. Mais ne pouvant plus faire vivre ses troupes en
Alsace, Bernard de Saxe-Weimar décide de se rapprocher de la
Franche-Comté. C'est sur ces entrefaites que l'ordre de
Richelieu lui parvient, favorisant ainsi ses desseins. Sans
hésiter, il entre en Franche-Comté du côté de
Saint-Hyppolite qu'il incendie. A partir de là , les
événements se précipitent.
Après avoir pillé Morteau,
Weimar saccage Montbenoit. Le dimanche 16 janvier au matin,
quelque vingt éclaireurs de Weimar sont vus sur les
Pareuses, hauteur située à proximité de Pontarlier. Comme le
duc de Lorraine Charles IV se trouve avec son armée dans le
val de Maillot, les bourgeois de Pontarlier délèguent un des
leurs auprès du duc pour obtenir son aide.
Le lundi
17, jour de la Saint Antoine, environ soixante cavaliers
paraissent au même endroit que la veille.
Le mardi
18, deux cents chevaux sont aperçus marchant du côté de
l'abbaye de Montbenoit.
Le mercredi 19, Ã trois
heures de l'après-midi, Bernard de Saxe-Weimar somme le
commandant de Saint-Mauris de lui remettre la Ville de
Pontarlier, faute de quoi il saurait ce qu'il aurait Ã
faire. Le commandant de Saint-Mauris lui répond que sa
Majesté catholique lui ayant confié cette place pour y faire
bonne garde et en rendre compte, il sait aussi ce qu'il a Ã
faire.
Le jeudi 20, les troupes suédoises et
françaises s'emparent des deux faubourgs de Pontarlier et
commencent en vain l'assaut des remparts de la ville.
Le vendredi 21, les assiégeants tentent par quatre fois
d'escalader les remparts. Bien que le Doubs soit gelé et
leur permette de dresser des échelles, ils échouent.
Le samedi 22, aucune attaque n'a lieu et des deux côtés on
se prépare pour les nouvelles attaques.
Le dimanche
23, les Suédois mettent le feu au faubourg Saint-Etienne en
espérant que le vent porterait le feu dans la ville dont les
maisons sont couvertes en bois. Mais un vent contraire vient
ruiner leurs espérances. Seules une maison et la chapelle de
la Croix brûlent. Profitant alors du désordre causé par cet
incendie, les Suédois et les Français essaient
d'entreprendre une nouvelle escalade mais ils sont
repoussés.
Le lundi 24, les munitions de guerre et
l'eau commencent à manquer. Les bourgeois de Pontarlier, qui
redoutent qu'une canonnade ne détruise les murailles de la
ville et qui n'espèrent plus aucun secours de la part du duc
de Lorraine, décident de sauver leur ville et leur vie. Ils
envoient le docteur Jean Miget auprès de Weimar afin de
fixer les conditions de la capitulation. Vers 10 heures du
soir, Miget rentre dans la ville avec les articles de la
capitulation. Celle-ci stipule que la ville ne serait pas
pillée, qu'elle ne serait pas obligée de payer une rançon,
que les bourgeois seraient maintenus dans la possession de
leurs biens et privilèges, qu'il ne devait être fait aucun
tort aux femmes et aux religieuses dans leur honneur, que
300 hommes seulement devaient entrer dans la ville et enfin
que la garnison en place à Pontarlier pourrait se retirer Ã
Besançon avec armes et bagages.
Le mardi 25, le duc
de Saxe-Weimar ne sort pas de son quartier et fait publier
un édit pour désarmer les bourgeois et recenser les hommes
absents. Escorté par un détachement de 500 chevaux suédois,
le commandant de Saint-Mauris sort de Pontarlier avec son
régiment et se rend à Besançon.
Le mercredi 26, le
duc de Saxe-Weimar fait son entrée dans la ville mais il est
bientôt suivi par 3 000 hommes au lieu des 300 prévus par le
huitième article de la capitulation.
Le jeudi 27,
après avoir mis le feu au faubourg Saint-Etienne, un
détachement marche du côté de Nozeroy tandis que le duc de
Saxe-Weimar fait entrer à Pontarlier 2 000 hommes en
garnison. Le duc ordonne alors au Maire et aux Échevins de
réunir 60 000 écus dans un délai de huit jours pour la
rançon de la ville, à défaut de quoi il n'hésiterait pas Ã
punir sévèrement, même par la mort. Après la capitulation de
Pontarlier, les troupes de Weimar vont sommer le bourg de La
Rivière d'ouvrir ses portes. Quelques bourgeois résistent
mais inutilement. Les bourgeois de Pontarlier n'ayant pu
rassembler que 10 000 écus, Weimar s'en prend à huit d'entre
eux qui sont bâtonnés avec dureté.
Le 4 février, le
comte de Guébriant prend Nozeroy et y établit ses quartiers.
Le 14 février, le château de Joux tombe aux mains
des Suédois grâce à la peur ou à la corruption du lieutenant
qui le commandait.
Le 20 avril, le comte de Guébriant
s'empare de Château-Vilain et le lendemain il assiège le
château de La Chaux.
Le 16 mai, Weimar, qui prétend
se faire roi du Jura, prend la ville de Saint-Claude.
Désespérant de prendre Besançon et Salins, Weimar fait
brûler tous les villages, hameaux ou fermes de Pontarlier
jusqu'Ã Salins.
Le 6 juillet, Pontarlier est la proie
des flammes. Plus de 400 personnes périssent dans cet
incendie qui ravage la ville en moins de deux heures. La
Rivière subit le même sort. Par ailleurs durant cette époque
sont détruits les villages des Arcenets près des Alliés, de
Cessay près de Frasne, de Goutte-d'Or près de Vaux et des
Bougnons près des Pontets. On raconte aussi quelques faits
singuliers. Ainsi les soldats de Weimar épargnèrent le
village de Bouverans parce qu'un habitant de ce lieu avait
consenti à ferrer leurs chevaux et, depuis, on a appelé la
famille de cet habitant « chez les Maréchaux ». De même
Bulle échappa à l'incendie à cause d'un épais brouillard qui
le dissimula aux yeux de l'envahisseur.
Le 8 juillet,
après six mois de pillage et de cruautés pendant lesquels
les Suédois se sont enrichis, le duc de Saxe-Weimar retourne
en Alsace.
Le 18 juillet 1639, Bernard, duc de
Saxe-Weimar, alors âgé de 35 ans, meurt de la peste Ã
Neubourg.
Pendant l'occupation suédoise, les
Francs-Comtois ne sont pas restés inactifs. Le capitaine
Claude Prost, dit Lacuzon, chef des partisans
francs-comtois, mène une guerre de guérilla contre
l'envahisseur et pille la Bresse. On dit que ses ennemis
priaient en disant: « Délivrez-nous, Seigneur, de la peste,
de la famine et de Lacuzon ! ».
A l'instar de
Lacuzon, le mythique Cart-Broumet, de Mouthe, (dont
l'existence n'a pas été prouvée, même si Petit-Huguenin en a
retracé la vie) mène la vie dure aux Suédois. Surnommé La
Plaque à cause d'une balafre à la joue, cet ancien soldat
des armées espagnoles accomplit de nombreux exploits Ã
Mouthe contre les Suédois. À la tête d'une troupe de
volontaires, Cart-Broumet harcèle les troupes de Weimar
dispersées dans la contrée. Il acquiert rapidement une
solide réputation. Aussi n'hésite-t-on pas à faire appel Ã
ses services dans la Chaux d'Arlier et du côté de Nozeroy. A
cet effet, sont délégués auprès de Cart-Broumet les sieurs
Marmier, de Frasne, Besson et Gloriod, de La Rivière, Dore,
de Bannans et Javaux, de Sainte-Colombe. Il se bat entre
Sainte-Colombe et La Rivière, près de Chaffois et près de
Bief-du-Fourg. Il participe à la défense de Nozeroy. Tout ce
qu'il entreprend lui réussit.
Après la mort de
Weimar, le marquis de Saint-Martin reprend Nozeroy,
Château-Vilain et le château de La Chaux. En même temps, don
Antonio Sarmiento de Tolède essaie de reprendre le château
de Joux avec l'aide des troupes du duc de Bourgogne.
Cette tentative est en réalité une manoeuvre destinée Ã
attirer l'ennemi dans un coin de la province et permettre
aux Comtois de faire ainsi tranquillement les moissons et
les vendanges. Ne pouvant plus supporter le blocus imposé
par Sarmiento, Christophe de Grün est sur le point de
capituler quand arrivent les troupes françaises conduites
par le marquis de Villeroy. Comme les moissons et les
vendanges sont terminées, Sarmiento n'insiste pas et lève le
siège du château de Joux. Apprenant que le siège a été levé,
le marquis de Villeroy décide de retourner en France et de
continuer la guerre sur les bords de l'Ain où il a fort Ã
faire avec les troupes de partisans francs-comtois.
Comme en avril 1639 le Parlement de Dole s'était plaint
qu'il n'avait personne à sa tête, le roi d'Espagne Philippe
IV nomme le conseiller Boyvin président du Parlement. Les
autres places vacantes sont également attribuées et, le 12
novembre 1639, le Parlement de Dole reprend ses séances
ordinaires.
Au cours de cette année 1639, le
Parlement de Dole avait mis à Nozeroy une garnison sous le
commandement de M. d'Arnans. Pendant les trois années qui
suivirent cette décision, les hommes de la garnison se
comportent en brigands des grands chemins : ils volent,
déchaussent et déshabillent ceux qu'ils rencontrent, ils
prennent le bétail, ils s'introduisent dans les maisons et
les pillent. Même situation à Grimont, maison forte située
près de Poligny, où les Français rançonnent fortement les
personnes qu'ils font prisonnières.
En Franche-Comté,
le plat pays est abandonné, la famine règne dans les villes
de Salins, Dole, Gray, et Besançon. Seuls quelques convois
de blé en provenance de Suisse ou de Savoie parcourent la
province. Chaque jour on espère que la paix est proche.
Le royaume de France connaît alors quelques changements.
En effet Richelieu meurt en décembre 1642, bientôt suivi par
Louis XIII en mai 1643, tandis que commencent les
négociations pour la paix. Par l'intermédiaire de M. de la
Pie, fermier des sauneries de Dole, et avec le consentement
du roi d'Espagne, le Parlement de Dole traite avec la France
qui est placée sous la régence d'Anne d'Autriche puisque le
nouveau roi de France Louis XIV n'a que cinq ans.
En
1644, par suite d'un traité particulier conclu avec Mazarin,
le successeur de Richelieu, la France s'engage à faire
cesser les hostilités en Franche-Comté. Moyennant 40 000
écus, la Franche-Comté rentre dans sa neutralité.
L'année 1644 voit donc le terme de la guerre de Dix Ans en
Franche-Comté. Néanmoins la guerre continue en Europe et
plus particulièrement en Allemagne. Mais en 1648, les
traités de Westphalie, conclus à Münster et à Osnabrück
entre l'empereur germanique Ferdinand III, la France et la
Suède, mettent fin à la guerre de Trente Ans dont un épisode
est connu en Franche-Comté sous le nom de guerre de Dix Ans.
CONSÉQUENCES DE LA GUERRE DE DIX ANS
Après la
guerre de Dix Ans, la situation est apocalyptique. La
guerre, la peste et la famine ont ruinées la Franche-Comté.
Villes incendiées, 70 châteaux brûlés, 150 villages qui ont
disparu, femmes violées, vieillards brûlés vifs, des morts
par milliers. Toutes l'économie et la démographie de la
Franche-Comté se trouvent bouleversées. L'agriculture doit
repartir à zéro : le bétail est mort, les labours et les
semailles n'ont pas été faits, les paysans sont partis dans
les villes ou à l'étranger. La perte démographique est
également très importante. Le recensement de 1614 donnait
une population voisinant entre 405 000 et 410 000 personnes
; celui de 1657 indique qu'il y avait environ 215 000
habitants en Franche-Comté. Une différence de quelque 200
000 personnes ! On peut estimer que les deux tiers des
Comtois sont morts pendant la période de la guerre de Dix
Ans. C'est une dimension d'épouvante, aussi bien en
Franche-Comté qu'en Europe.
[1] La Franche-Comté
avait été divisée en circonscriptions judiciaires et
administratives. La création en revient à Philippe le Bel
qui a créé le bailliage d'Amont et le bailliage d'Aval. Le
bailliage d'Amont s'étendait sur le nord de la province : le
versant méridional des Vosges, le plateau de la Haute-Saône
et la région de Baume-les-Dames. Le chef-lieu de bailliage
est Vesoul, le centre économique est Gray. Le bailliage
d'Aval comprenait le sud de la province. Il est plus grand
et plus riche. Dole et Poligny sont les villes importantes.
Pontarlier et sa région faisaient partie de ce bailliage. En
1422, Philippe le Bon créa un troisième bailliage : le
bailliage du Milieu ou de Dole qui provient du démantèlement
du bailliage d'Aval.
SOURCES DOCUMENTAIRES
•
Histoire de la Franche-Comté, publiée sous la direction de
Roland Fiétier.. - Toulouse : Privat, 1977.
• GIROD
(Edouard). - Esquisse de la ville de Pontarlier. -
Pontarlier : Imp. Thomas, 1857.
• GIRARDOT DE NOZEROY. -
Histoire de Dix Ans de la Franche Comté de Bourgogne.
•
Annuaire du Doubs - Années 1847, 1848 et 1864.
•
PETIT-HUGUENIN - Épisode de la vie de Cart-Broumet Alexis
surnommé la Plaque. - Pontarlier : Imp. Thomas.
LOUIS
(Gérard). - La guerre de Dix Ans : 1634-1644. - Besançon :
Presses universitaires de Franche-Comté, 1998. - (Annales
littéraires de l'Université de Franche-Comté). - [Prix du
Livre Comtois, 1999].